Pour recours mal fonde dans un litige qui l'oppose à la mairie de la commune de Sobra : Le CRD déboute Sogeco-SARL de sa requête

Il ordonne la poursuite de la procédure de passation en cause

3 Mai 2025 - 01:17
 0
Pour recours mal fonde dans un litige qui l'oppose  à la mairie de la commune de Sobra : Le CRD déboute Sogeco-SARL de sa requête
Alassane Ba

Le mardi 11 mars 2025, le Comité de règlement des différends de l'Autorité de régulation des marchés publics et des délégations de service public s'est réuni, sous la présidence d'Alassane Ba (président), aux fins de statuer sur un litige opposant la Société générale de construction (Sogeco-SARL) à la mairie de la Commune de Sobra. Il a délibéré conformément à la loi et a adopté une délibération fondée sur les faits, la régularité du recours et les moyens exposés par les parties.

Statuant en commission litiges sur le recours non juridictionnel de la Société générale de construction (Sogeco-SARL) contestant les résultats de l'appel d'offres DRPCO n°002/CRS/2024 relatif aux travaux de construction de 3 salles de classes, une direction, un bloc de 2 latrines, ainsi que sur la fourniture d'équipements scolaires pour l'école de Sandama, située dans la Commune rurale de Sobra (cercle de Siby, région de Koulikoro), le CRD ordonne la poursuite de la procédure d'attribution du marché.

Le formulaire de soumission de la discorde

Dans le cadre du Programme d'appui conditionnel des performances des collectivités territoriales de la Coopération malienne-allemande du 27 août 2024, financé par des droits de tirage spéciaux sur les ressources, la mairie de la Commune de Sobra a publié l'appel d'offres DRPCO n°002/CR S/2024. Celui-ci portait sur la réalisation, en deux lots, de travaux de construction (3 salles de classes, une direction, un bloc de 2 latrines) ainsi que sur la fourniture d'équipements scolaires pour l'école de Sandama, située dans la Commune rurale de Sobra (cercle de Siby, région de Koulikoro). La Sogeco-SARL a soumissionné pour les deux lots.

Par lettre sans numéro du 20 février 2025, reçue le 21 février 2025, le maire de la Commune rurale de Sobra a informé la Sogeco-SARL du rejet de son offre pour les motifs suivants, applicables aux deux lots : Primo : modification du formulaire de soumission (la lettre de soumission ne comporte pas la date de remise des offres et le numéro du dossier d'appel d'offres en haut du document).

Secundo : le formulaire de la situation financière de l'entreprise renseigné n'est pas à l'image des bilans présentés.

L'année 2022 est considérée comme une année sans exercice notoire chez l'entreprise et les données renseignées sont identiques pour les trois ans.

Suivant la lettre AGB/21/02/2025 du 21 février 2025, reçue par la mairie le 25 février 2025, la Sogeco-SARL a introduit un recours gracieux auprès de l'autorité contractante afin de contester les résultats de l'appel à concurrence. Par lettre sans numéro du 28 février 2025, le maire de la Commune rurale de Sobra a notifié à la Sogeco-SARL, qu'après examen de son recours gracieux, il maintient les motifs de rejet initialement retenus par la commission d'analyse des offres. Par Lettre n°AGBB/03/03/2025 du 3 mars 2025, la Sogeco-SARL a saisi le Comité de règlement des différends, pour contester les résultats de l'appel à concurrence susmentionné.

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 120.1l du décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 portant code des marchés publics et des délégations de service public, modifié : "tout candidat ou soumissionnaire s'estimant lésé au titre d'une procédure de passation d'un marché ou d'une délégation de service public est habilité à saisir l'autorité contractante ou l'autorité délégante d'un recours gracieux à l'encontre des procédures et décisions lui causant ou susceptibles de lui causer préjudice" ;

Considérant que l'article 120.2 du même décret dispose que "l'exercice du recours gracieux préalable est obligatoire pour tout candidat ou soumissionnaire qui entend exercer une action en contestation devant le Comité de règlement des différends".

Considérant que conformément aux dispositions de 1article 120.3 du décret n°2015-0604/P-RM ci-dessus, le recours peut porter sur la décision d'attribuer ou de ne pas attribuer le marché ou la délégation, sur les conditions de publication des avis, les règles relatives à la participation des candidats et aux capacités et garanties exigées, le mode de passation et la procédure de sélection retenue, la conformité des documents d'appel d'offres à la règlementation, les spécifications techniques retenues, les critères d'évaluation. Il doit invoquer une violation caractérisée de la règlementation des marchés publics et des délégations de service public.

Considérant que l'article 121.1 du décret n°2015-0604/P-RM dispose que les décisions rendues au titre du recours gracieux peuvent faire l'objet d'un recours devant le Comité de règlement des différends dans un délai de deux (2) jours ouvrables à compter de la date de notification de la décision faisant grief.

Considérant qu'il résulte des faits exposés que le 25 février 2025, la Sogeco-SARL a exercé un recours gracieux contre les motifs de rejet de son offre et qu'une suite défavorable a été réservée à ce recours le 28 février 2025.

Considérant que le 3 mars 2025, la requérante a saisi le CRD d'un recours en contestation conformément aux dispositions des articles 120 et 121 du Code des marchés publics.

Au vu de tout ceci, il s'ensuit que le recours de la Sogeco-SARL remplit les conditions de forme pour être recevable.

Les arguments confrontés

A l'appui de son recours, la Sogeco-SARL a indiqué ce qui suit :

Que, pour répondre à l'appel d'offres n°002/CR S/2024 relatif aux travaux de construction et à la fourniture d'équipements scolaires pour l'école de Sandama, elle a soumis une offre strictement conforme aux conditions et prescriptions du DAO, notamment en respectant le modèle imposé pour la lettre de soumission.

Que lors de l'ouverture des plis, il a été constaté que le numéro de l'appel d'offres et son intitulé figuraient en objet du document, et que la date de soumission (30/01/2025) était dûment indiquée en bas, et que le fait de mentionner cette date en bas ou en haut de la lettre de soumission n'est pas un critère d'élimination dans le DAO et n'affecte en rien la qualité de l'offre.

Qu'elle conteste les deux motifs avancés par la mairie de la Commune rurale de Sobra pour invalider son dossier, en précisant que, d'une part, le formulaire de la lettre de soumission n'a pas été modifié par rapport au modèle indiqué dans le DAO, la mention de la date en bas du document étant conforme aux prescriptions ; et, d'autre part, concernant les données financières, bien que les bilans soient identiques sur trois ans, les comptes de résultats attestant des chiffres d'affaires présentent les montants suivants : 2021 : 143 375 000 F CFA ; 2022: 0 FCFA ; et 2023 : 232 000 000 F CFA. Ce qui donne un chiffre d'affaires annuel moyen de 125 125 000 F CFA, largement supérieur au chiffre d'affaires de 50 000 000 F CFA demandé pour le lot 1 et de 5 000 000 F CFA pour le lot 2, conformément au DAO. Etc. Etc.

En réponse aux prétentions de la Sogeco-SARL, l'autorité contractante a fourni une documentation rappelant les éléments ayant motivé le rejet de 1'offre, et que ces éléments constituent une modification du formulaire de soumission, alors qu'il est clairement mentionné dans le formulaire que le format ne doit être modifié et, aucune substitution ne sera admise.

En ce qui concerne les états financiers, il est incompréhensif qu'une année à zéro exercice puisse avoir les mêmes informations de bilan qu'une année normale.

Il n'est mentionné nulle part que l'offre est rejetée pour insuffisance de résultat moyen de bilan, ni que l'offre est présentée en TTC. Mais bien avant la date de dépôt des offres, les soumissionnaires ont été informés de l'exonération des fonds de la KfW pour les sous projets concernés, donc obligatoirement les offres sont en hors taxes.

De plus, il est de son devoir de publier l'avis d'attribution du marché mais pas de communiquer ou de donner individuellement une copie du procès-verbal d'évaluation des offres ou de communiquer le nom de l'attributaire aux autres soumissionnaires et que cela n'était possible qu'après l'avis juridique de la direction régionale des marchés publics et des délégations de service public. Conclusion de la mairie : l'offre de la requérante n'est pas conforme.

Le CRD examine et décide

Considérant les dispositions du Code des marchés publics qui imposent que les offres des soumissionnaires soient strictement conformes aux spécifications du dossier d'appel d'offres (DAO).

Considérant la clause 1.1 des CCAP, laquelle exige que l'autorité contractante établisse la conformité de l'offre exclusivement sur la base de son contenu, ainsi que la clause 1.3 qui prévoit la possibilité d'écarter toute offre présentant une divergence, une réserve ou une omission substantielle par rapport aux stipulations du DAO.

Considérant que le respect strict du dossier d'appel à concurrence et des dispositions du code des marchés publics impose à l'autorité contractante d'assurer une transparence totale dans le processus de passation.

Qu'en application de l'article 79.2 du code, elle a l'obligation de  communiquer, par écrit, l'ensemble des informations relatives à l'attributaire provisoire ainsi que le procès-verbal de la séance plénière ayant conduit à l'attribution.

Que dès lors, l'argument selon lequel cette communication serait subordonnée à l'obtention préalable d'un avis juridique est inopérant, car cet avis, établi par l'organe de contrôle à priori sur le rapport rendu par la commission d'évaluation, est déjà acquis avant la notification du rejet des offres.

Que par conséquent, I' autorité contractante doit veiller à l'observation stricte de cette obligation dans le cadre des procédures de passation qu'elle initie, afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement entre les soumissionnaires et de la transparence indispensable à la procédure.

Considérant la mention figurant sur le modèle de lettre de soumission joint au DAO :

"[Le Candidat remplit la lettre ci-dessous conformément aux instructions entre crochets. Le format de la lettre ne doit pas être modifié. Aucune substitution ne sera admise.]"

Considérant qu'en l'espèce, l'Autorité contractante a relevé que la lettre de soumission de la Sogeco-SARL ne comportait pas, en haut du document, la date de remise des offres et le numéro du dossier d'appel d'offres, ces éléments étant reportés en bas du document, constituant ainsi une modification du format prescrit.

Considérant que cette modification, non conforme aux instructions explicites du DAO, constitue une substitution interdite et représente une divergence substantielle affectant l'intégrité de l'offre.

Considérant également que l'Autorité contractante a constaté une incohérence entre le formulaire de situation financière et les bilans présentés, notamment pour l'année 2022, remettant en cause la concordance des informations financières essentielles.

Considérant en outre que ces irrégularités, tant formelles que substantielles, compromettent le principe d'égalité de traitement entre les soumissionnaires ainsi que la transparence de la procédure de passation des marchés publics.

Il s'ensuit que le rejet de l'offre de la Sogeco-SARL est justifié, et que le recours introduit par celle-ci est mal fondé.

En conséquence, le CRD déclare le recours de la Sogeco-SARL recevable en la forme ; dit que le recours de la Sogeco-SARL est mal fondé ; et ordonne la poursuite de la procédure de passation en cause.

                    El Hadj A.B. HAIDARA

Quelle est votre réaction ?

Like Like 0
Je kiff pas Je kiff pas 0
Je kiff Je kiff 0
Drôle Drôle 0
Hmmm Hmmm 0
Triste Triste 0
Ouah Ouah 0