Il est encore dans son silence médiatique, mais ne manque pas de faire quelques soubresauts pour clarifier certaines zones d’ombre. Le vendredi dernier, le Mali entier a été fier de voir le Capitaine Amadou Haya Sanogo se rendre à l’Aéroport pour accueillir le président de la République par intérim, le Professeur Dioncounda Traoré, de retour de Paris après deux mois de soins suite à son agression du 21 mai 2012.
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Le président malien par intérim Dioncounda Traoré (g) et l'ancien chef de la junte militaire Amadou Sanogo, le 12 avril 2012 à Bamako © AFP[/caption]
Le Capitaine est venu discrètement à l’Aéroport à la suite du Premier Ministre. Son cortège de sécurité s’est fait discret et la discrétion a été totale dans le salon. Depuis le 21 mai, Amadou Haya Sanogo a en réalité affiché son engagement à respecter tous les Accords et notamment celui de ne pas gêner la Transition. C’est ainsi que nous ne l’avons plus vu sur les écrans de la Télévision nationale, entendu sur les ondes des radios, lu dans les journaux.
Ce repli «
médiatique» a tout naturellement laissé libre cours à toutes sortes de rumeurs allant du départ du Capitaine du pays à un accident de la circulation qui l’aurait paralysé. Rien de tout cela, ont pu constater la plupart des Maliens qui ont regardé la Télévision malienne, vendredi dernier dans le journal. Notre consœur Hawoye Touré, qui a eu l’exclusivité de l’interview du Capitaine, lui a posé les questions justes. S’agissant de sa présence à l’accueil du président de la République, l’homme de Kati a dit «
qu’il a tenu à être présent à l’Aéroport parce qu’il y a d’abord l’homme ensuite l’Institution, qui, suite à des événements malheureux, s’est retrouvé hors du pays pour soins. Je suis là en tant que président du Comité militaire de suivi des réformes des forces de défense et de sécurité». Est-il prêt à œuvrer à la sécurité du président et des organes de la Transition ? Le capitaine a répondu sans ambages que cela est du ressort des forces armées et de sécurité et qu’il veillera personnellement à cela. «
Je tiens à préciser que si, lui, (président de la République, Ndlr) a confiance en son armée et en ses forces de sécurité, bien sûr pour son entourage, les forces armées ne ménageront aucun effort pour assurer sa sécurité. On jouera notre partition, comme on l’a toujours fait», a-t-il déclaré.
Faire bouger les lignes
L’accolade chaleureuse entre les deux hommes dans le salon de l’Aéroport de Bamako-Sénou et les mots prononcés par le Capitaine ont fini de convaincre les Maliens que la Transition prenait de nouvelles couleurs : celles de l’union sacrée. Il faut dire qu’à Kati, au cours de nombreuses consultations, les différents membres du CNRDRE et les proches collaborateurs du Capitaine ont abattu un gros travail de réflexion quant au nouveau repositionnement de l’Armée dans la conduite de la Transition. Car à Kati, s’il y a une chose qui manque, c’est bien l’appui médiatique. Pour un officier membre de l’ex-CNRDRE, ses camarades ont profondément souffert de ce qu’ils considèrent comme une partialité d’une grande partie de la presse nationale et internationale plus proche des milieux politiques et des instances internationales que de la réalité des faits depuis le 22 mars, et l’esprit qui a prévalu à l’action des forces armées et de sécurité pour mettre fin à ce qu’ils ont dépeint comme «
le régime incompétent et corrompu de Amadou Toumani Touré». Et pourtant, cette réalité de l’ancien régime est reconnue par une importante partie du peuple malien. Dur, donc d’être incompris par un des remparts de la démocratie que reste la presse !
A Kati, l’on considère, selon nos sources, que le Mali a perdu trop de temps dans les querelles de personnes et de clans alors que l’urgence est au Nord comme l’a toujours rappelé le Capitaine Amadou Haya Sanogo. Les militaires qui comptent jouer leur partition sont donc arrivés à la conclusion que tous les fils et filles du Mali doivent composer dans leur diversité et leur richesse, et le pays ne manque pas de solutions de sortie de crise. Le plus grand regret des membres de l’ex-CNRDRE, c’est que leur appel aux retrouvailles de tous les fils dans une concertation nationale ait été rejeté à chaque fois, alors même que jusque-là, la classe politique et la société civile continuent de l’évoquer sans y aller.
En tous les cas, à Kati l’on semble résolument décidé à faire bouger les lignes, à aller à l’apaisement et à composer avec toutes les parties pour une sortie de crise heureuse pour le pays. La sagesse affichée par le Capitaine et ses collaborateurs dont le Lieutenant Konaré à l’Aéroport lors de l’accueil du Pr Dioncounda Traoré, le discours de dimanche soir du Président par intérim ont confirmé cette tendance. Les organes annoncés par lui et la partition que jouera l’Armée semblent des gages sûrs pour une meilleure maîtrise des stratégies et approches de retour à la stabilité de reconquête de notre Nord et de l’organisation d’élections libres et transparentes.
Par A.M