Gouvernement de l'Azawad : Ce qu'a décidé le premier conseil des ministres

Le mouvement rebelle indépendantiste MNLA tient à viabiliser son fameux Etat de l'Azawad. Seulement, la chose ne semble pas aisée. D'abord parce l'Etat autoproclamé n'a été encore reconnu par personne au monde. Ensuite parce que le territoire de l'Azawad pose problème, le MNLA n'en occupant qu'une partie, le reste étant occupé par le mouvement islamiste Ansar Dine et ses alliés d'AQMI. Après l'échec de la fusion avec Ansar Dine, le MNLA a formé, la semaine dernière, son "gouvernement de transition". Le fantomatique gouvernement a, bien entendu, eu de la peine à trouver un siège. Après une réunion de crise, il a été décidé de squatter les locaux du gouvernorat de Gao et de les transformer en palais du gouvernement de transition. Pour quoi choisir Gao comme capitale de l'Azawad alors que les combattants du MNLA sont pour la plupart originaires de Kidal et de Tombouctou ? Selon les informations rassemblées par nos sources à Gao, la ville a été choisie pour la simple raison qu'elle est la seule des trois capitales régionales du nord où le MNLA avec Ansar Dine  un rapport de force militaire presque équilibré. En effet, Kidal est la ville natale d'Iyad Ag Gahly, patron d'Ançar Dine: elle ne peut pas devenir la capitale de la République de l'Azawad dans la mesure où Iyad n'est pas pour l'indépendance de la     zone mais qseulement pour l'application de la charia islamique. Quant à Tombouctou, la deuxième grandce ville, elle rsste sous le contrôle prédominant des terroristes d'AQMI: il serait hasardeux d'aller y installer un gouvernement de l'Azawad. Selon toujours nos sources, même à Gao, le gouvernement  du MNLA aura du mal à siéger: la population, qui manque d'eau et d'électricité, pointe du doigt le MNLA comme responsable de ses souffrances; de plus, les combattants du MNLA passent pour des voleurs et des violeurs et les populations leur préfèrent de loin la compagnie des barbus d'Ansar Dine. Enfin, les autorités traditionnelles locales, auxquelles le gouvernement du MNLA a été présenté, ne le reconnaissent pas. Le gouvernement du MNLA lui-même ne semble pas avoir foi en lui. De ses 28 membres, 9 sont présents à Gao mais les autres sont résident en Mauritanie, soit en France; ils refusent de rejoindre la précaire capitale de leur République pour raison de sécurité. En plus de ne pas avoir le contrôle de l'ensemble du territoire de l'Azawad, le gouvernement du MNLA vient de subir un nouveau revers d'ordre moral et politique. Jeudi dernier, à l'occasion d'une cérémonie de mariage, trois jeunes combattants du MNLA ont violé une jeune fille de Gao. Ils ont été immédiatement arrêtés par les soldats d'Ansar Dine et conduits au tribunal islamique érigé par ce mouvement  islamiste. Au cours de leur procès, les trois accusés reconnaîtront les faits. Les deux premiers, qui avaient tenu les jambes de la fille violée, ont été condamnés à recevoir 80 coups de fouet chacun. Quant au troisième, qui a abusé sexuellement de la fille, il a été condamné à la lapidation, une peine qui consiste à lui jeter des pierres jusqu'à ce que mort s'ensuive. Malgré l'opposition ouverte du gouvernement transitoire de la République de l'Azawad, les deux premiers condamnés ont reçu publiquement les 80 coups de fouet pronnoncés contre eux. Quant au combattant condamné à la lapidation, il bénéficie d'un délai recours: si ce recours échoue, il sera lapidé à mort, ont affirmé les juges islamiques. Ces derniers, armés comme leur chef Iyad Ag Ghali, ont tenu à prévenir le public de Gao: "Qu'on soit d'Ansar Dine ou non, nul ne pourra échapper à la loi islamique dans cette ville.". Les juges d'Ansar Dine ne badinent pas avec la loi islamique car après le cas des combattants du MNLA, deux adolescents de Gao (un graçon et une fille) ont été suivis par la milice islamique et surpris en pleins ébats sexuels  samedi dernier. Jugés  et condamnés immédiatement, leur peine devait être appliquée hier dimanche sur la place publique de Koïma, commune de Gounzouré:  la jeune fille (avec quelles complicités ?) a pu s'enfuir; quant au garçon, il a déclaré être célibataire  pour "bénéficier" de 80 coups de fouet au lieu de subir la lapidation à mort. Les juges, plongés dans le doute, ont décidé de surseoir à l'exécution de la peine, le temps de mener une enquête sur le statut matrimonial du condamné. Ces épisodes judiciaires traduisent la prédominance politique et militaire d'Ansar Dine sur le terrain, à Gao. Pour asseoir son autorité dans "sa" capitale, le gouvernement de l'Azawad va donc devoir d'abord passer sur le corps d'Iyad Ag Ghali, perspective peu probable car Iyad est mieux armé et plus respecté par la population. Conscient du danger d'isolement  qui le guette, le gouvernement du MNLA veut conquérir le coeur des populations. Au cours de son premier conseil des ministres, tenu le mercredi dernier dans les locaux du gouvernorat de Gao, le gouvernement avait inscrit un seul point à son ordre du jour: le ravitaillement des populations en denrées de première nécessité et en énergie électrique. Comme la population de Gao manque de tout et survit grâce aux seules aides humanitaires du Comité international de la Croix rouge (CICR) et que cette dernière a annoncé son départ définitif de la zone à partir du 20 juin 2012, le gouvernement a décidé de "faire appel à ses partenaires techniques et financiers pour assurer le ravitaillement de la population de l'Azawad en denrées alimentaires,  en eau et en électricité", a déclaré à notre correspondant permanent un haut responsable du MNLA. Sans préciser qui sont ces "partenaires techniques et financiers" de l'Azawad.   Abdoulaye Guindo