[caption id="attachment_73360" align="alignleft" width="250" caption="Mamadou Namory"]

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Le Ministre Mamadou Namory Traoré marque son arrivée à la tête du département de la Fonction Publique en engageant un combat titanesque contre l'usage du faux qui a pendant longtemps terni l'image de la Fonction Publique. Tout en saluant l'engagement de son prédécesseur dans la gestion de ce dossier, le Ministre a décidé de sévir pour mettre fin à ces pratiques déloyales. 2 000 cas de diplômes non authentiques dont 1700 cas ont été décelés dans le seul secteur de l'Education. En clair pour le patron de la fonction publique : " si on ne sévit pas, cela voudrait dire que c'est autorisé, il faut que les gens sachent qu'on ne peut pas continuer à tricher car tricher, c'est s'exposer à des sanctions ". Le message est on ne peut plus clair.
L'Indépendant : Comment se porte aujourd'hui la fonction publique malienne en termes d'effectifs et de besoins dans le contexte difficile que nous vivons ?
Mamadou Namory Traoré: Merci pour cette question. Vous avez bien souligné le contexte difficile que connaît notre pays. Je dois dire que la Fonction publique, en général, s'est comportée de façon honorable parce qu'elle a assuré la continuité de l'Etat. De ce point de vue, on peut dire que la Fonction publique contient des cadres qui ont conscience de leur responsabilité vis-à-vis de leur Etat.
Aujourd'hui, la Fonction publique compte 44 579 fonctionnaires (catégories A, B et C) et 11 442 contractuels.
Ses besoins sont énormes et sont satisfaits en fonction des moyens de l'Etat. C'est dire donc que le recrutement se fait en fonction des besoins dont les outils d'évaluation sont disponibles. Il s'agit des cadres organiques qui définissent les fonctions, les profils et les effectifs par poste. C'est sur la base de ces données que chaque département exprime ses besoins : par voie de concours pour les fonctionnaires des catégories A, B et C. et, jusqu'à une date récente, de décision discrétionnaire du ministre en charge de la fonction publique. Les concours, c'est la voie royale et on ne va pas changer mais le recrutement par décision discrétionnaire, notre ambition est qu'il soit ouvert à tous. Malheureusement souvent des diplômés qui pourraient à des catégories A B et C se font recrutés en catégories D et E. Je veux être clair avec ceux-ci : c'est une voie sans issue. La seule voie d'entrée des A,B et C dans la fonction publique c'est le concours. Voilà grosso modo l'état de la Fonction publique qui, il faut le noter, connaît de gros problèmes ces derniers temps.
L'Indép. : M. le ministre, le phénomène des faux diplômes prend de l'ampleur et interpelle tous. Au moment de leur recrutement pour certains et de leur intégration dans la Fonction publique pour d'autres, beaucoup, d'agents produisent des faux documents. Combien sont-ils et quelles sanctions encourent-ils ?
M.N.T : Les contractuels de l'Etat qui sont intégrés dans la Fonction publique avec des faux diplômes sont, aujourd'hui, au nombre de 148. Les sanctions qu'ils encourent et qui vont se matérialiser bientôt, c'est qu'on va annuler purement et simplement leur décision d'intégration. Ce qui veut dire qu'ils redeviennent ce qu'ils étaient avant c'est-à-dire contractuels en ce qui concerne ceux qui ont utilisé les faux documents uniquement pour l'intégration. Par contre, s'il s'avère que leur recrutement en tant que contractuel a été effectué sur la base de faux diplômes, c'est la radiation.
Lors des travaux du comité de pilotage mis en place pour procéder à l'intégration des contractuels dans la fonction publique de l'Etat, pour les contractuels de l'Etat et dans la fonction publique des Collectivités pour les contractuels des Collectivités. Ce comité de pilotage s'est appuyé sur les travaux de contrôle effectué par les comités ministériels d'intégration. Au total on a intégré 14 139 agents contractuels dans la fonction publique des Collectivités et 7 000 pour la fonction publique de l'Etat.
C'est lors de ce processus d'intégration qu'on a décelé environ 2 000 cas de diplômes non authentiques dont 1700 cas dans le seul secteur de l'Education. Ils ont fourni des faux documents pour pouvoir accéder au meilleur pallié de l'intégration. Heureusement, l'administration a bien fait son travail et a décelé ces anomalies.
Par honnêteté intellectuelle, je dois reconnaître que mon prédécesseur a essayé de faire quelque chose en informant qui de droit mais il n'y a jamais eu de suite. J'ai donc trouvé ce dossier ici et j'en ai saisi le gouvernement parce qu'on ne peut pas laisser de telles pratiques perdurer. Si on ne sévit pas, cela voudrait dire que c'est autorisé. C'est aussi un message clair à tous: il faut que les gens sachent qu'on ne peut pas continuer à tricher car tricher, c'est s'exposer à des sanctions. C'est pourquoi, des sanctions seront prises à l'encontre de tous ceux qui sont concernés par les faux diplômes. Pour le moment, ils sont 148 contractuels intégrés dans la Fonction publique, leur décision sera annulée et des investigations sont en cours pour tous les autres.
Pour les contractuels des collectivités, c'est aux maires, présidents de Conseils de Cercle et d'Assemblées régionales de trancher. Ultérieurement, ce sera au ministre de l'Administration territoriale de prendre la décision en tant que ministre de la Fonction publique des collectivités. Voilà comment nous entendons résoudre ce phénomène des faux diplômes.
Je profite aussi pour lancer un message à l'endroit de la jeunesse, à s'éloigner de ces pratiques, mais de travailler pour obtenir de vrais diplômes et avoir la compétence requise. A un moment, il ya de dizaine de milliers de jeunes détenteurs de vrais diplômes et n'ayant pas d'emplois, il est inadmissible qu'on garde dans la fonction publique des gens qui se sont prévalus de faux diplômes pour y accéder.
L'Indép. : Que comptez-vous faire désormais pour mettre fin à ces pratiques qui perdurent?
M.N.T : Il s'agit de mettre en place des systèmes de contrôle à tous les niveaux pour empêcher les gens de produire des faux diplômes. C'est pourquoi, il est impératif de sévir car si on ne sanctionne pas, c'est le règne de l'impunité. D'ailleurs, il n'est pas exclu d'engager des poursuites judiciaires pour faux et usage de faux.
Abdoulaye DIARRA