Détenus de Kati : Jours noirs au Cachot

26 Juine 2012 - 12:20
26 Juine 2012 - 12:20
 8  41
[caption id="attachment_68784" align="alignleft" width="310" caption="Amadou Haya Sanogo, président CNRDRE"][/caption] Des améliorations seraient maintenant perceptibles dans leurs quotidiens. L'alarme sonnée par les défenseurs des droits de l'Homme ayant certainement produit leurs effets, le Général Hamidou Sissoko et ses compagnons d'infortune commencent à respirer un peu. Si des visites sont désormais autorisées aux comptes - gouttes, il apparaît que leurs droits à la nourriture seraient toujours filtrés. En cette période, leurs gardiens, des durs, leur feraient avaler des couleuvres. Or, au rythme où vont les choses, rien ne devrait permettre de telles animosités. Quant à leurs dossiers, ils ne résisteraient nullement devant une cour digne d'une République. ela fait plusieurs semaines que des officiers de notre pays ont été  arrêtés sous divers motifs, incarcérés  et déportés à Kati où siège l'ex - junte militaire, le CNRDRE. Ils ont été maintenus dans le secret total jusqu' à ce que le département de la justice ne prenne au sérieux leur cas. Présentés devant le procureur de la République, ils ont  été accusés de tous les crimes : " Détention illégale d'armes, assassinats, atteinte à la sûreté intérieure… " Patati Patata ! Par la suite, des avocats sortirent pour défendre leurs droits. Droit à la visite, droits aux repas aux visites autorisées. Auparavant, des rumeurs faisaient état de pires traitements inhumains contre les prévenus. Par exemple, l'on racontait que le plus gradé d'entre - eux, le Général Hamidou Sissoko, était menotté constamment et jeté dans une cellule. Il en était de  même pour le Colonel Abdoulaye Cissé, le Commandant Mamadou Lamine Konaré, et bien d'autres. Il était  alors difficile de démentir ces rumeurs en l'absence de témoignages contradictoires. Dans les familles intéressées, l'on fuyait d'en débattre. Des épouses de détenus ne les auraient par reconnu lors de brefs entretiens en présence d'hommes en armes. Il nous a été rapporté que des frères de certains d'entre - eux n'ont pu garder leurs larmes tant les souffrances étaient visibles. Leur gardien en chef, un curieux sous - officier, répondant au nom de Siriba Diarra, aurait juré de leur faire voir toutes les souffrances du monde. Ce serait lui qui détiendrait en otages les prévenus de Kati. En tout cas, son nom est régulièrement cité dans les grins de Bamako. De bonnes langues révèlent que le Capitaine Amadou Haya  Sanogo, le chef de l'ex - junte, désormais auréolé de son statut d'ancien Chef de l'Etat, ne jouerait pas un rôle décisif dans le traitement de l'affaire. Son compagnon, le lieutenant Amadou Konaré, serait sur la même longueur d'onde. Paraîtrait - il que d'autres membres du CNRDRE seraient disposés à décanter cette situation qui n'honore nullement notre pays, en premier lieu l'institution militaire.  

Les faits sont têtus  Dans un passé  récent,  l'histoire politique du Mali  a connu des drames, des tragédies. De brillants intellectuels civils et militaires ont fait les frais de purges insensées. Après le Coup d'Etat de 1968, des dignitaires du régime défunt furent mis à l'écart sans raison. Certains seront déportés à l'intérieur du pays pendant près de dix ans. En aucun moment, la justice n'a statué sur leurs cas. Aucune cour ne les avait jugé et condamné. Exception notable, d'autres auront la hanche d'accompagner le CMLN (Comité Militaire de Libération Nationale) dans la gestion des affaires publiques. Mais, bien avant cette période, le Mali avait perdu d'importantes ressources humaines. Sans raison, le régime dit socialiste s'écarta et écarta des hommes et femmes qui pouvaient pourtant lui venir en aide. L'on se rappelle des procès organisés en catimini et ayant envoyé à la mort Maraba Kassoum, Hammadoun Dicko, Fily Dabo Sissoko etc. A présent, des zones d'ombre pèsent  sur les contours de cette triste affaire. De 1968 à 1991, des affaires similaires se sont déroulées. Ce fut une dure période où le Mali perdit de brillants officiers. Coup sur coup, il y a eu des éliminations physiques. Pour mémoire, l'on peut citer les Capitaines Diby Sillas Diarra, Alassane Diarra, Mamy Ouattara, Sawadogo… Ensuite, il y a eu des dizaines de sous - officiers qui furent des victimes de la guerre des chefs au sein du CMLN. Son chef du gouvernement, le Capitaine Yoro Diakité  trouva la mort dans le bagne de Taoudénit. Le Capitaine Malick Diallo eut plus de chance après avoir purgé dix années de prison dans le Sahara. C'est un vieil homme que nous avons eu la chance de voir parfois à la pharmacie " Soudanaise " chez son épouse. Il était sorti gravement malade de cette prison. La liste noire est longue. En février 1978, les lieutenants Colonels Kissima Doukara, Tiècoro Bagayoko, Karim Dembélé furent balayés par la tempête. Les deux premiers cités ont été sauvagement tués à Taoudénit. Le troisième, Karim Dembélé, sortit de prison dans un état déplorable. N'eut été le Bon Dieu, il n'aurait pas fait plus de dix ans après sa libération. Dans le lot, il y avait le Colonel Charles Samba Sissoko qui passa cinq années en prison. Dans la foulée, il y avait le lieutenant - Colonel Joseph Mara. Il purgera une peine de cinq ans de prison à Taoudénit. L'histoire retiendra que le Capitaine de police Youssouf Balla Sylla fut également privé de sa vie à Taoudénit. Son compagnon, le Capitaine Yacouba Coulibaly retourna à Bamako, après 10 ans de prison, mais très malade. Mon cousin, l'Inspecteur de police Aboubacar Diarra, eut la petite chance d'écoper une peine de cinq ans de travaux forcés. A sa sortie, c'est un membre de la famille que nous avons découvert victime de graves tortures. Dans l'ensemble, ils étaient une trentaine d'officiers de l'armée e de la police à être humiliés, embastillés, torturés à vie, et délaissés. C'est le lieu d'évoquer le cas du Capitaine Soungalo Samaké et celui des Colonels Mamadou Mariko (Chef d'Etat Major de l'Armée de terre de l'époque)  et Abdoulaye Diallo dit Dax (Patron de la Gendarmerie au même moment). Tout petit, nous avons vu ces dignes éléments de la vaillante Armée, parfois enchaînés ou menottés, attachés tels des fagots et transportés au camp du Génie militaire de Bamako. Des coups de cravaches pleuvaient dans l'enceinte du Centre d'Opération (actuel foyer). Depuis cette époque, nous avons eu le sentiment que notre pays se trouvait  sur une pente dangereuse. La suite, on la connaît.  

L'après mars 91 Certes, après ce coup d'Etat perpétré par une certain Amadou Toumani Touré (ATT) et compagnons, il y a eu encore des purges, mais, force est de reconnaître que les camps d'éliminations physiques (Kidal et Taoudénit) avaient disparu de la scène. Il y a eu des procès. Les condamnés à mort eurent la vie sauve. Certains échappèrent à la guerre des chefs. Par exemple, le lieutenant - Colonel Oumar Diallo dit Birus continue à mieux vivre en dehors de l'Armée. Le Commandant de police, Anatole Sangaré, a poursuivi une brillante carrière par la suite. Aujourd'hui, il est à la retraite avec ses galons de général. L'un et l'autre peuvent désormais dormir tranquillement avec le sentiment d'avoir bien servi le Mali, leur pays. Un moment, l'atmosphère était polluée par les tentatives de coups d'Etat, imaginaires ou vrais. Une chose est sûre, les présumés auteurs s'en sortirent sans dommages sérieux. L'un des capitaines du Génie militaire dont nous taisons le nom, fut un moment cité dans une affaire du genre. Blanchi, il est maintenant Colonel de son état. Notons, cependant, que tout le monde n'a pas eu une telle chance.  

B. Koné

Quelle est votre réaction ?

Like Like 0
Je kiff pas Je kiff pas 0
Je kiff Je kiff 0
Drôle Drôle 0
Hmmm Hmmm 0
Triste Triste 0
Ouah Ouah 0